Les écoles de commerce et universités qui enseignent les métiers du vin forment aussi les futurs manageurs à la science de la vigne, à la chimie et au marketing
Par Éric Nunès
Bienvenue au laboratoire de la School of Wine & Spirits Business, à Dijon. Ici, des dizaines de paillasses immaculées se succèdent, une modernité anguleuse accueille l’arrondi des bouteilles, une lumière franche éclaire des dizaines de postes où les élèves peuvent étudier arômes, robes, éclats d’un vin. Peut-être que, bientôt, comme le personnage joué par Louis de Funès dans le film de Claude Zidi L’Aile ou la cuisse, ils pourront déduire l’origine, le cépage et le cru d’un nectar en en laissant glisser quelques centilitres dans le creux d’un verre.
Toutefois, dans cette salle de dégustation, on ne forme pas d’œnologues ou de vignerons. Mais pour vendre du vin et parler à ceux qui le font, le comprendre est un prérequis nécessaire. Pas d’impasse donc ! Et les écoles de commerce qui forment au business des métiers du vin forment aussi les futurs manageurs à la viticulture, à la science de la vigne et à la chimie. Des formations qui ont un prix : 12 500 euros pour le master spécialisé en commerce international des vins et spiritueux de la School of Wine & Spirits Business bourguignonne, et c’est 14 000 euros qu’il faut débourser pour suivre les enseignements du master of science in wine & spirits management de Kedge Business School, à Bordeaux.
Dans les écoles d’ingénieurs où l’élargissement des champs d’enseignement habituel est également acté, les établissements qui préparent les agronomes de demain intègrent dans leur cursus l’acquisition de compétences managériales. Business school ou école d’ingénieurs, deux voies très différentes mais qui se rapprochent autour d’un verre et des métiers du vin. Ce métissage des filières, l’École supérieure d’agricultures d’Angers lui a donné corps en créant son master international vintage. Son objectif : développer une double compétence technique et marketing dans l’univers vitivinicole, largement ouverte à l’international avec environ 30 % d’étudiants étrangers. « Près de 50 % des diplômés travaillent ensuite dans le commerce ou le marketing sur l’exportation de vins français », révèle René Siret, directeur général de l’école d’agriculture.
« Répondre aux marchés selon des cibles marketing »
Idem au sein de l’Institut des hautes études de la vigne et du vin (IHEV) de Montpellier SupAgro, qui a mis en place un master 2 d’études spécialisées en management de la vigne et du vin (entre 7 800 et 10 500 euros pour deux années) en partenariat avec l’Organisation internationale de la vigne et du vin (OIV) pour proposer l’acquisition de « compétences transversales ». L’idée : « Former les étudiants à une maîtrise telle qu’ils pourront adapter leurs gestes techniques afin de répondre aux marchés selon des cibles marketing », expose Bruno Blondin, directeur de l’IHEV. Il s’agit d’être en capacité de produire selon les goûts, les demandes et en fonction des contraintes géologiques et climatiques. Du vin sur mesure en quelque sorte.
Devenir un homme ou une femme d’affaires avec les compétences d’un scientifique, c’est également le pari que remporte chaque année le master vins et champagne de l’université de Reims-Champagne-Ardenne. La formation, qui se déroule sur deux années, accueille une vingtaine d’étudiants, pour la plupart licenciés en « science, biologie, biochimie ou chimie, observe Philippe Jeandet, directeur du master. La première année, les unités d’enseignement sont scientifiques. On y apprend la biologie moléculaire, les levures, les micro-organismes. En deuxième année, on étudie le marketing, la comptabilité, le droit, les marchés… » La formation change de paradigme pour permettre d’acquérir une maîtrise et une vision globales des métiers.
Une immersion dans un univers complémentaire que la Wine & Spirits Academy du groupe d’écoles de commerce Kedge, à Bordeaux, pratique également pour son master MVS (management des vins & spiritueux). La business school délivre près d’un quart de ses cours à l’Institut des sciences, de la vigne et du vin de la capitale girondine, établissement rattaché à l’université de Bordeaux, fort de 250 chercheurs. C’est dans ce palais de l’œnologie que les futurs négociants acquièrent les indispensables notions de viticulture, illustration de la convergence des formations, à laquelle les métiers du vin se prêtent parfaitement.
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